La bonne samaritaine
Dans la vie, Alessandra Sublet est nature, comme à l’écran. Rire communicatif, verbe haut, l’animatrice parle sans fard. Des passions qui la poussent là où elle a envie d’aller, sans calcul ni compromission. Depuis son départ de « C à vous », la quotidienne à succès de France 5, Alessandra Sublet présente « Fais moi une place » et des soirées événementielles, dont l’une a été consacrée aux Inconnus et l’autre aux crooners de légende. Lors de notre rendez-vous, elle planchait sur un nouveau talk-show pour France 2 qui, si tout va bien, devrait être à l’antenne fin février. Moteur…
Vous revendiquez haut et fort vos origines lyonnaises alors que vous baignez dans le marigot parisien de la télé. Dur à gérer ?
Absolument pas, je suis une femme qui est née à Lyon, qui continue à aimer sa ville tout en étant parisienne depuis douze ans. Il ne faut jamais oublier ses racines, synonymes de toutes ces années où l’on se construit. Je ne pense pas être un cas particulier : les Français sont, dans l’ensemble, plutôt chauvins.
Jeune, qu’aviez-vous envie de faire?
Le journalisme me tentait beaucoup, rien à voir donc avec mon métier actuel. J’avais beaucoup d’admiration pour ces gens qui partaient sur le terrain, en reportage ou pour des missions humanitaires. Je n’ai pas vraiment fait d’études, j’ai en revanche beaucoup voyagé après mon bac, pendant six-sept ans. J’avais l’âme d’une baroudeuse. Je la conserve d’une certaine façon, mais au lieu d’enchaîner les pays, je change de plateau…
Justement, vous êtes passée d’une émission quotidienne, « C à vous », à des rendez-vous mensuels plus des émissions événementielles (« Tenue de soirée exigée », ndlr)…
L’une des grandes chances d’exercer ce métier d’animatrice est justement de pouvoir toucher à tout. Je serais vraiment malheureuse de me retrouver cantonnée dans une case, de ne faire que des divertissements ou des talk-shows…
Vous avez arrêté « C à vous » en plein succès, une prise de risque, non ?
Oui, mais je ne l’ai pas fait comme un acte militant, histoire que tout le monde relève le côté courageux de la chose. Je me suis dit qu’arrêter n’était pas un drame, qu’il fallait saisir les opportunités. Et puis tout le monde a le droit de se planter, non ? De nombreux animateurs m’ont dit en off qu’ils avaient peur de perdre leur job. C’est pareil pour tout le monde. Personnellement, je ne pourrais jamais me lever un matin en faisant la gueule parce que je dois faire quelque chose dont je n’ai pas envie.
Qu’est-ce qui a changé depuis que vous avez arrêté « C à vous » ?
J’ai enfin une vraie vie de famille. Et je ne suis plus la chef d’entreprise que j’étais devenue avec cette émission qui, partant de rien, est devenue une grosse machine. Mais je me souviens que lorsque l’on a lancé l’émission avec Pierre-Antoine Capton, mes amis de Libération ou des Inrockuptibles me disaient : « Tu es suicidaire, tu vas sur France 5 dont tout le monde se fout, pour animer une émission en access, une case trustée par “Le Grand Journal” ! » Je savais que je n’avais rien à perdre, comme si j’allais au front sans armes. On a vu le résultat…
Quel regard portez-vous sur la notoriété ? En avoir une vous importe-t-il ?
Dieu m’en garde ! Je pense avoir beaucoup de recul envers ce sentiment. Après avoir reçu de nombreux artistes, je sais que courir après la notoriété est voué à l’échec. Ce n’est pas une fin en soi… Tout cela me laisse de glace, je fais ce que j’aime. Point.
Idem pour la célébrité ?
La célébrité est un atout quand j’accompagne ma fille au Jardin d’acclimatation : les gardiens me reconnaissent alors je bénéficie de quelques passe-droits pour voir les animaux ! Mais en même temps, je suis dans la vie comme je suis dans mes émissions. Une anecdote : récemment, à Orly, nos bagages tardaient à arriver et des gens m’accostent et me disent : « On est content de voir que vous attendez aussi ! » Évidemment, il n’y a pas de système VIP pour les valises ! Nous avons discuté et j’ai compris que les gens croient ce qu’ils voient à la télé, donc si dans la vie vous êtes différente, eh bien cela ne marche pas. Quelle paranoïa de ne pas être ce que l’on est !
Vous parliez de votre vie de famille retrouvée, une bonne nouvelle après le baby blues que vous avez raconté dans T’as le blues, baby ?
J’avais lu sur le sujet, on m’en parlait, mais je n’avais jamais vécu une dépression, c’est-à-dire ne pas avoir envie de voir les gens ou espérer que mon mari parte avec ma fille, tout ça en restant dans le noir. J’ai compris ensuite que ma dépression venait de loin et qu’elle n’était pas seulement due à mon accouchement ; ma grand-mère a connu la même chose. Depuis, j’ai rencontré de nombreuses femmes qui l’ont subie. Je me demande comment elles ont fait ! En réalité, tout le monde possède un terrain dépressif. Je pense même qu’il est bizarre de traverser une vie sans dépression. Et puis, écrire ce livre m’a fait du bien. Je me suis rendu compte qu’en parlant avec le cœur, on touchait forcément les gens. Actuellement, j’essaie d’ailleurs d’adapter T’as le blues, baby ? pour le cinéma avec, entre autres, l’aide de mon mari, le producteur Clément Miserez (qui a récemment produit Belle et Sébastien, ndlr).
Entre animateurs, la télé devient un véritable champ de mines, tout le monde « clashe » tout le monde, comme Thierry Ardisson qui ne manque pas une occasion de souligner votre prétendue inculture.
Qu’en pensez-vous ?
Ce phénomène est effectivement nouveau, même si Fogiel le faisait très bien à son époque. C’est un peu pitoyable. Vous pouvez me toucher personnellement, mais professionnellement rien ne m’atteint tellement je suis bien dans mes baskets ! Concernant Thierry, je serais quand même curieuse de le voir un jour entre « quatre-z-yeux » pour savoir ce qui lui a pris. Ce type a inventé pas mal de choses en télé, gamine je regardais toutes ces émissions, et aujourd’hui il me donne l’impression de décliner à dire du mal des autres, avant tout pour faire parler de lui à mon avis. Mais pour quel bénéfice ? Surtout à une époque où les gens demandent plus de bonne humeur et moins de négativité.
Que répondriez-vous à propos de ce manque supposé de culture ?
J’ai des goûts très éclectiques en musique. Je suis très chanson française – les anciens comme la jeune génération –, Benjamin Biolay, Vanessa Paradis… J’aime voir les artistes sur scène, l’épreuve de vérité ! Et puis pour « C à vous », j’ai tout vu, lu et écouté pendant quatre ans. Côté culture, les Parisiens ont un défaut : pour être bien, un film, un livre ou un disque doit être « branché ». Je pense tout simplement qu’il faut être curieux et pas blasé…
Vous êtes également égérie pour Garnier. Comment définiriez-vous la beauté ?
La beauté, c’est la simplicité. Après la naissance de ma fille, je vais voir mon dermato pour quelques taches de grossesse et il me dit : « Il faudrait penser au Botox pour la ride du lion… » Je n’ai pas donné suite ! Les crèmes ne sont pas des produits miracles mais elles aident à mieux vieillir. Quant à mon rôle d’égérie, il était indispensable pour moi de représenter des produits accessibles. Je ne peux pas être populaire d’un côté et promouvoir un parfum qui vaut une fortune de l’autre…